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Infections, pathologies, maladies dans le cadre de la grossesse

Publié le 01 fév 2019Lecture 7 min

De nouvelles recommandations pour la prise en charge de l’Infection néonatale bactérienne précoce (INBP ex-IMF)

Pascal BOILEAU, Laurence FOIX-L'HÉLIAS, Christèle GRAS-LE GUEN

Après la généralisation du dépistage et de l’antibioprophylaxie per-partum des colonisations à streptocoque du groupe B, le taux des infections néonatales bactériennes précoces a diminué chez les nouveau-nés à terme. De nouvelles recommandations ont été élaborées afin d’adapter les pratiques diagnostiques et thérapeutiques à cette évolution épidémiologique et limiter le recours excessif aux examens complémentaires et aux antibiotiques. Un des points clef de ces nouvelles recommandations consiste à remplacer les anciennes indications d’antibiothérapie probabiliste par une surveillance clinique renforcée en maternité pour les nouveau-nés asymptomatiques.

Depuis la généralisation du dépistage et de l’antibioprophylaxie per-partum des colonisations à streptocoque B (SGB), l’incidence des infections néonatales précoces (INBP) a diminué. Cette évolution rend nécessaire de modifier nos pratiques diagnostiques et thérapeutiques afin de ne pas continuer à exposer de nombreux nouveau-nés à des examens complémentaires invasifs et à des antibiothérapies à large spectre aux effets délétères(1). C’est dans ce contexte qu’un groupe de travail s’est réuni sous l’égide de la Société française de néonatologie afin de proposer de nouveaux algorithmes de prise en charge à la lumière des données de la littérature publiée depuis la diffusion des recommandations ANAES en 2002 et analysée selon la méthodologie préconisée par la HAS. Les recommandations proposées sont assorties d’un grade, reflet du niveau de preuve existant : grade A pour preuve scientifique établie, grade B pour présomption scientifique, grade C pour faible niveau de preuve et grade AE pour accord d’experts. L’enjeu de ces recommandations était double : 1) ne pas manquer un cas d’infection bactérienne, car l’impact d’un retard diagnostique et thérapeutique a été montré comme associé a une sur-morbidité et un excès de mortalité ; 2) réserver les examens complémentaires, les traitements antibiotiques et les hospitalisations idéalement aux seuls nouveau-nés infectés. Cette approche nécessite donc une évaluation et une stratification individualisée du risque infectieux basée sur des paramètres anamnestiques, cliniques, et biologiques. L’analyse de la littérature internationale récente a permis d’identifier 5 facteurs de risque d’INBP justifiant d’une indication d’antibiopropylaxie per-partum(2). Ces 5 situations sont les suivantes (grade A) : la fièvre maternelle > 38,0° C isolée ou non en per-partum ou dans les 2 heures post-partum quel que soit le résultat de la culture du prélèvement vaginal (PV) du 9e mois ; une prématurité spontanée et inexpliquée < 37 SA (si PV inconnu) ; une colonisation maternelle à SGB (PV ou ECBU) ; un antécédent d’infection néonatale à SGB lors d’une précédente grossesse ; une durée de rupture des membranes > 12 heures (si PV inconnu). Le pédiatre sollicité auprès d’un nouveau-né suspect d’INBP doit évaluer si une antibiopropylaxie per-partum était indiquée et vérifier son administration adéquate. Les critères d’adéquation de l’antibiopropylaxie per-partum sont les suivants (Grade B) : l’antibiothérapie maternelle devra avoir été administrée :par voie parentérale (intraveineuse), au moins 4 heures avant la naissance, en utilisant la pénicilline G, l’ampicilline ou l’amoxicilline, ou la céfazoline ; tout autre traitement antibiotique (molécule, modalités et délai d’administration inférieur à 4 heures avant la naissance) est à considérer comme inadéquat. Figure. Stratification du risque d’INBP chez le nouveau-né asymptomatique selon l’existence de facteurs de risque pre- et per-partum et préconisations correspondantes de surveillance. L’algorithme proposé sur la figure combine ces différents éléments afin de distinguer une population de nouveau-nés à faible risque d’infection pour lesquels aucune prise en charge spécifique n’est nécessaire en plus des soins habituels de maternité (ou de néonatologie en cas de prématurité) d’une population à plus haut risque d’infection qui doit faire l’objet d’une surveillance clinique renforcée en maternité et être examinée par un pédiatre entre 6 et 12 heures de vie. La population à risque intermédiaire doit être surveillée de manière renforcée en maternité également. En effet, la très grande majorité des nouveau-nés infectés deviennent symptomatiques avant la 24e heure de vie, la population des nouveau-nés à haut risque et à risque intermédiaire d’INBP ne peuvent pas faire l’objet d’une sortie précoce de maternité (48 h minimum de surveillance clinique). Le point le plus important de ces nouvelles recommandations est sans doute la place centrale donnée à la surveillance clinique en maternité, selon une grille formalisée où sont colligés température, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, existence de signe de lutte et aspect cutané (tableau). Les signes cliniques retenus pour appeler la sage-femme ou le pédiatre sont (grade AE) : une température ≥ 38,0° C ou < 36,0° C ; une fréquence cardiaque > 160/min (au calme) ou < 80/min ; une fréquence respiratoire > 60/min ; la présence d’un tirage, d’un geignement ou d’apnée ; un teint cutané anormal : pâleur, cyanose, marbrures, ou teint gris. Tableau. Paramètres cliniques, seuils d’alerte et fréquence de la surveillance en maternité. Le recours aux examens complémentaires a été également profondément modifié dans ces nouvelles recommandations. L’hémoculture reste l’examen de référence en matière de diagnostic d’INBP, indiquée pour tout nouveau-né avec symptômes INBP ou sepsis avant l’initiation d’une antibiothérapie probabiliste (grade A). Son volume idéal est de 2 ml (grade C), et de 1 ml minimum pour en garantir une sensibilité acceptable (l’inoculum bactérien est souvent faible en cas d’INBP). La très grande majorité des hémocultures positives à germe pathogène le devient avant la 48e heure. Au-delà de ce délai, la probabilité d’identifier une bactérie pathogène est pratiquement nul, autorisant d’interrompre un traitement antibiotique probabiliste dès H48 en cas d’hémoculture négative et d’une évolution clinique favorable. Les indications de ponction lombaire (PL) et mise en culture du liquide céphalo-rachidien restent inchangées : altération de l’état général, symptômes neurologiques, sepsis néonatal, bactériémie à germe pathogène, réponse partielle à l’antibiothérapie à H48. En revanche, une valeur élevée isolée de CRP n’est pas une indication de PL. Les contre-indications à la PL sont inchangées : en cas d’instabilité hémodynamique ou de signe neurologique de localisation, la PL doit être différée, sans pour autant retarder l’initiation du traitement antibiotique probabiliste. L’intérêt des techniques de biologie moléculaire est établi, permettant un diagnostic a posteriori dans les cas où la PL été faite sous antibiothérapie (grade B). Initialement retenue en 2002 pour sa valeur prédictive négative très performante, l’analyse microbiologique des liquides périphériques et du liquide gastrique en particulier n’est plus recommandée (grade B). La très faible incidence des INBP rend la valeur prédictive négative moins pertinente et en pratique, cet examen trop largement pratiqué (plus d’un nouveau-né sur 2 en France(3) a été à l’origine de très nombreux bilans et antibiothérapies a posteriori inutiles chez des nouveau-nés asymptomatiques. L’hémogramme n’était déjà plus recommandé depuis 2002 dans le diagnostic d’INBP. La CRP (C-réactive protéine) constitue par contre un biomarqueur intéressant du fait de sa valeur prédictive négative. Deux CRP normales réalisées entre 8-24 heures de vie puis 24 heures plus tard ont une valeur prédictive négative de 99,7 %(4), de très nombreux dosages de CRP sont pratiqués en maternité pour surveiller la cinétique de ce marqueur. Afin d’en limiter les indications, il est recommandé de ne pas prélever une NFS ou un dosage de CRP à la naissance pour diagnostiquer l’INBP (grade B), ni même en cas d’initiation d’une antibiothérapie (grade B), mais uniquement au-delà de 12 heures de vie. Un dosage de la CRP 24-48 heures après antibiothérapie pourrait aider à arrêter le traitement en cas d’hémoculture négative à 48 h (grade C). La place de la procalcitonine dans le diagnostic d’INBP n’est pas établie avec un niveau de preuve suffisant pour la recommander en routine dès aujourd’hui(5). Les résultats d’une large étude multicentrique française qui vient de s’achever permettront dans quelques semaines de préciser l’intérêt d’un dosage au sang du cordon ombilical afin de s’affranchir du pic physiologique post-natal qui complexifie l’interprétation des dosages dans les 72 premières heures de vie. Le dosage au sang du cordon ne permet pas par contre de repérer les infections qui débutent en post-natal. En conclusion, les principaux changements des nouvelles recommandations HAS 2017 sont les suivants : les indications d’antibiothérapie doivent rester exceptionnelles chez un nouveau-né asymptomatique ; la détection précoce des signes d’infection est indispensable pour ne pas retarder l’initiation de l’antibiothérapie compte tenu des conséquences délétères connues sur la morbi-mortalité ; une surveillance clinique formalisée (cf tableau) en maternité doit être préférée à l’antibiothérapie probabiliste chez l’enfant asymptomatique. La formation des équipes soignantes à cette formation est indispensable à son efficacité ; la place de la CRP et de la Procalcitonine dosée au sang du cordon et en post-natal dans l’initiation et l’arrêt de l’antibiopthérapie devrait être prochainement précisée et compléter les recommandations HAS 2017.

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