Publié le 31 jan 2020Lecture 4 min
Panorama des lésions du col au cours de la grossesse
Jean-Jacques BALDAUF, Lise LECOINTRE, Émilie FALLER, Thomas BOISRAME, Chérif AKLADIOS , Hôpital de Hautepierre – Hôpitaux Universitaires de Strasbourg
L’examen prénatal constitue une bonne occasion pour découvrir les manifestations de l’infection à papillomavirus humain (HPV) chez la femme enceinte, qu’il s’agisse de lésions exophytiques vues à l’examen clinique ou de lésions cervicales infra cliniques dépistées au frottis. Pendant la grossesse, les manifestations de l’infection HPV sont identiques à celles observées chez la femme non enceinte.
Les condylomes acuminés
Les condylomes acuminés ne représentent que 6 % des infections HPV de la femme enceinte. Les atteintes du revêtement cutané ano-génital et du revêtement muqueux de la vulve, du vagin et du col se caractérisent par une tendance à l’extension et à la prolifération au cours de la grossesse. Ces lésions exophytiques sont associées aux HPV de type 6, 11, 42, 43 et 44. Elles sont généralement faciles à reconnaître, uniques ou multiples, isolées ou groupées, et de taille variable, allant du petit condylome acuminé (figure 1) à des masses coalescentes importantes. Les lésions infracliniques associées sont fréquentes et doivent faire l’objet d’une évaluation cytocolposcopique complète de toute la filière génitale. La tendance à l’extension et l’hyperhémie tissulaire peu vent favoriser certaines complications maternelles : ulcération, hémorragie, surinfection et obstruction des voies génitales.
L’infection infraclinique
Elle se manifeste essentiellement dans la zone de transformation du col sous la forme d’une infection HPV pure (condylome plan) ou d’une néoplasie associée à l’infection HPV (CIN). Le frottis cervico-vaginal constitue le moyen de dépistage habituel de ces lésions et la surveillance prénatale constitue une occasion où il est recommandé de prélever le frottis chez les patientes peu ou mal suivies, notamment chez celles sans frottis prélevés depuis 2 ans(1).
Environ 5 % des frottis prélevés au cours de la grossesse révèlent des anomalies dont 1 à 2 % correspondent à un cancer. Chez la femme enceinte, chez qui on trouve des frottis avec des atypies de signification indéterminée (ASC-US) ou des lésions intraépithéliales de bas grade, un contrôle (par un nouveau frottis prélevé après l’accouchement) est recommandé(2). Toutes les autres anomalies du frottis doivent faire l’objet d’une colposcopie immédiate. La technique de l’examen colposcopique est classique, mais les manipulations risquent plus facilement de faire saigner les issus hyperémiés et congestifs. Globalement, les modifications physiologiques de la grossesse rendent l’interprétation colposcopique plus difficile, mais la proportion de colposcopie satisfaisante est plus importante et augmente avec l’âge gestationnel.
Généralement, le col est hypertrophié, d’une couleur rouge violacée, avec des papilles endocervicales volumineuses et irrégulières sécrétant un mucus abondant. L’augmentation de la taille et du nombre des vaisseaux produit une importante hyperhémie avec une congestion et un ramollissement du stroma. Les cellules conjonctives subissent des modifications déciduales, parfois li mitées, plus rarement intenses et étendues. Elles peuvent rester mineures et focales, prendre l’aspect de nodules saillants blanchâtres ou, plus rarement, se manifester sous la forme de polypes déciduaux solides, grisâtres, sans épithélium de surface (figure 2).
L’ectropion est sou vent plus saillant, avec des papilles volumineuses et grossières séparées par des replis glandulaires profonds. Il se produit fréquemment une accentuation des aspects vasculaires avec des mosaïques ou des ponctuations grossières. La surface de la zone de transformation devient plus irrégulière, avec des orifices glandulaires saillants. L’épithélium métaplasique immature peut être le siège d’une réaction acidophile particulièrement intense. L’association de ces images et les aspects grossiers de certaines anomalies rendent le diagnostic colposcopique plus difficile, parfois impossible.
Certaines modifications bénignes peuvent prendre une intensité pouvant faire penser à des anomalies plus sévères. La coloration au lugol est intense, brun foncé. En cas de CIN, l’intensité de l’acidophilie et l’accentuation des anomalies vasculaires peuvent donner une impression de lésion plus sévère. L’aspect des épithéliums immatures et la congestion intense peuvent masquer certaines lésions. L’impression colposcopique de lésion de bas grade est incertaine, mais l’aspect colposcopique des CIN de haut grade reste généralement identifiable (figure 3).
De même, les signes de gravité en faveur de l’invasion restent classiques et souvent associés les uns aux autres : zone hémorragique, érosion muqueuse, ulcération et nécrose ; surface irrégulière, col déformé ; lésion étendue ; vascularisation grossière et vaisseaux atypiques (figure 4).
Conclusion
Malgré l’importance des modifications gravidiques du col, la colposcopie reste un examen fiable chez la femme enceinte. Grâce à la biopsie dirigée, la concordance du diagnostic au cours de la grossesse avec le diagnostic final du post-partum autorise la surveillance des CIN au cours de la grossesse et leur traitement approprié après l’accouchement. Elle évite le plus souvent le recours à une conisation diagnostique.
Références
1. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021817748&dateTexte=&categorieLien=id
2. Recommandations professionnelles. Conduite à tenir devant une femme ayant une cytologie cervico-utérine anormale. http://www.e-cancer.fr/Actualites-et-evenements/Actualites/Cytologie-cervico-uterine-anormalerecommandations-sur-la-conduitea-tenir
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