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Nouveau-né

Publié le 11 avr 2021Lecture 6 min

Le nouveau-né de faible poids de naissance : prise en charge des 3 premières années

Sophie PARAT, Service médecine néonatale et réanimation, Port-Royal, Paris

L’enfant de faible poids de naissance (PN) est un enfant de PN < 2 500 g. Cette entité correspond à une population extrêmement hétérogène composée de nouveau-nés prématurés et hypotrophes. Parmi ces derniers, il est important de repérer ceux qui présentent un retard de croissance intra-utérin (RCIU) à risque de complications et de ne pas surmédicaliser les autres.

Diagnostic d’un RCIU Seuls 20 % des RCIU sont diagnostiqués pendant la grossesse grâce à la surveillance échographique. Les courbes de croissance par rapport à l’âge gestationnel permettent de définir si le nouveau-né est eutrophe ou hypotrophe. L’hypotrophie est définie statistiquement : biométrie inférieure à une norme pour un âge gestationnel donné. Plus elle est modérée (entre 5e et 10e percentile), plus l’enfant est susceptible d’être simplement constitutionnellement petit et donc à faible risque de morbidité. Un PN inférieur au 3e percentile (équivalent à -2DS) a plus de probabilité de correspondre à un RCIU. À l’inverse, une limite trop basse ne permet pas de diagnostiquer tous les RCIU. Les courbes customisées Audipog, accessibles sur Internet, ajoutant aux données des mensurations néonatales celles de la mère ainsi que sa parité, sont plus discriminantes pour diagnostiquer un RCIU. Le dépistage des enfants porteurs de RCIU permet de repérer les plus à risque. En l’absence de diagnostic anténatal, il est réalisé à la naissance par l’analyse de la biométrie par rapport à l’âge gestationnel, voire par des courbes customisées. Les étiologies du RCIU sont multiples (tableau). Complications du RCIU Période néonatale En période néonatale, le RCIU est associé à un surcroît de mortalité et de morbidité. Les risques augmentés d’anoxo-ischémie sont à l’origine d’une augmentation du taux de césarienne, d’induction de prématurité ou de petit terme (37-38 SA), de mauvaise adaptation néonatale. Par ailleurs, hypoglycémies, hypocalcémie, hypothermies, difficultés alimentaires et ictère plus fréquents induisent des séjours hospitaliers plus prolongés. Complications à moyen et long terme des RCIU Le RCIU témoigne d’une altération de la nutrition foetale, pouvant avoir un impact à long terme, et ce quelle que soit sa cause. Si 90 % des enfants présentent un rattrapage staturopondéral dans les 2 premières années, 10 % d’entre eux gardent un retard de taille < - 2DS à l’âge de 2 ans, qui persistera à l’âge adulte. Le rattrapage chez l’enfant prématuré RCIU est plus tardif et moins fréquent (24 % à 5 ans ont une taille < - 2DS). L’allaitement maternel a un effet positif sur ce rattrapage. La petite taille des parents, l’importance du RCIU (taille ou poids) et la prématurité exercent un effet contraire. En dehors de certains syndromes génétiques, l’étiologie du RCIU ne joue pas sur le rattrapage. L’impact du RCIU sur le développement cérébral est parfois aggravé par une asphyxie néonatale. Le risque de paralysie cérébrale comme celui de déficit cognitif est augmenté. L’allaitement maternel, un rattrapage staturo-pondéral et de périmètre crânien sont associés à un meilleur développement. L’adaptation du foetus à un environnement défavorable entraîne des modifications hormonales définitives et programme l’organisme vers un phénotype d’épargne. Un rattrapage pondéral précoce est associé à un risque métabolique à l’âge adulte. L’enfant RCIU est exposé à une morbidité néonatale accrue. À plus long terme, il expose au retard statural, à des complications neurologiques et à un syndrome mé tabolique. L’allaitement maternel exerce un effet protecteur vis-à-vis de ces risques. Prise en charge En période néonatale L’examen clinique recherche des malformations même mineures (l’hypospade est fréquemment associé au RCIU en dehors de tout syndrome génétique), un syndrome dysmorphique, une longueur de membres ou de segments de membres anormale. L’ensemble de la biométrie (poids, taille et périmètre crânien) est évalué. Élément majeur de la prévention des hypoglycémies conjointement au fractionnement des repas toutes les 3 heures, la limitation des pertes énergétiques est en première ligne et peut être favorisée par : berceau chauffant, maintien du bonnet, pratique du peau à peau et limitation des bains. La surveillance des glycémies est poursuivie au minimum 48 heures. Lorsque l’allaitement maternel est souhaité, son soutien est souvent nécessaire initialement. Des compléments de préparation enrichie pour nourrisson ou de colostrum exprimé par la maman sont souvent donnés jusqu’à la montée de lait. Les compléments de lait de mère tiré sont poursuivis jusqu’à ce que l’enfant soit capable d’être autonome au sein. L’utilisation du tire-lait permet d’améliorer la production de lait maternel, ce qui facilite les tétées et la poursuite de l’allaitement sur plusieurs mois. Les explorations réservées aux RCIU sont souvent limitées à une numération sanguine et une calcémie prélevées vers 2-3 jours. Les risques de polyglobulie, de thrombopénie et de neutropénie sont majorés. La recherche systématique d’infection à CMV a été évaluée dans quelques études avec des résultats variables : ce risque est estimé faible et le RCIU est rarement isolé. La recherche de CMV dans la salive est impérative si le PC est < - 2DS ou devant d’autres signes évocateurs (thrombopénie). Le reste des explorations est guidé par la clinique, mais il n’y a souvent pas d’urgence à les pratiquer si l’enfant est autonome avec un suivi possible. La préservation du lien mère-enfant est fondamentale et les inquiétudes parentales fréquentes. Dans les trois premières années • Prise en charge nutritionnelle Le rattrapage précoce est associé à un meilleur devenir statural et neurologique, mais il est également associé à un risque majoré de syndrome métabolique à l’âge adulte. Devant ce discours apparemment contradictoire, que faire ? • L’alimentation avec un lait enrichi de façon prolongée (9 mois) a été associée à un moins bon devenir neurologique par rapport à un lait non enrichi, lui-même inférieur à un allaitement maternel. La supériorité de l’allaitement a également été démontrée chez l’enfant prématuré, même en cas de moindre rattrapage pondéral. • Si une prise de poids trop faible (< 1 200 g) dans les 16 premières semaines a été associée significativement à un moins bon développement de l’enfant à 7 ans, il en est de même d’une prise de poids trop importante (> 5 kg). La croissance de rattrapage est donc initialement respectée, mais non forcée (pas d’utilisation prolongée de formule enrichie [pré] au-delà de 3 kg ou augmentation injustifiée d’apports caloriques ; réassurance maternelle). Étant donné les avantages particuliers pour le RCIU de l’allaitement maternel, celui-ci est encouragé et soutenu. La supplémentation martiale est justifiée si le PN est < 2 500 g. Le stock en fer est alors faible et les besoins sont augmentés par la croissance rapide. Le traitement est débuté vers 2 à 6 semaines à la dose de 1 à 2 mg/kg/j pendant 6 mois. • Le suivi du développement neurologique est particulièrement attentif en l’absence de rattrapage et en cas de petit PC. Les troubles visuels plus fréquents sont recherchés. • Avis spécialisés. La consultation avec un généticien est indiquée en cas de signes dysmorphiques, de malformations, d’anomalie de taille de segment de membre, de retard de développement, de microcéphalie ou de trouble d’oralité importants. Échographie cardiaque, abdominale, ETF sont alors pratiquées systématiquement. Les radios de squelette sont plus informatives après 3 mois et l’IRM à partir de 6 mois. À 2 ans, lorsque la taille de l’enfant est < - 2,5 DS pour l’âge, ou < - 1,5 DS pour la taille cible (utilisable si les deux parents sont de taille appariée), un avis auprès d’un endocrinologue est requis. Le traitement par hormone de croissance a une AMM pour une taille < - 2,5 DS, mais n’est remboursé qu’à partir de - 3 DS. Ce traitement lourd et contraignant nécessite une expertise et une information complète des parents. • Syndrome métabolique. La surveillance annuelle de la tension artérielle est généralement facile à partir de 3-4 ans. Aucun bilan métabolique systématique n’est utile à cet âge. Conclusion Parmi les enfants de faible PN, le RCIU présente des risques accrus en période néonatale, mais aussi à long terme, à type de petite taille, troubles du développement neurologique, syndrome métabolique. Il est important de les distinguer des enfants petits constitutionnellement. L’allaitement maternel est un élément protecteur important de toutes ces complications. Le rattrapage staturo-pondéral dans les 2 premières années est associé à une amélioration du développement statural et neurologique, mais ne doit pas conduire à du forçage alimentaire. Quelques enfants requerront d’être orientés vers un endocrinologue et un généticien.

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