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Vaccination

Publié le 04 mai 2022Lecture 5 min

Des arguments contre les réticences aux vaccins anti Covid-19 pendant la grossesse

Pierre MARGENT
Des arguments contre les réticences aux vaccins anti Covid-19 pendant la grossesse

En France, la vaccination des femmes enceintes contre la Covid-19 fait l'objet d'une campagne de sensibilisation. Quid de la balance bénéfice-risque ? Selon deux articles récemment publiés dans le JAMA, si cette immunisation protège des complications d'une contamination, elle n'engendre pas de sur-risque de fausses-couches, de naissances prématurées, de naissance par césarienne, de score Apgar bas, de chorioamniotite ou encore de réanimation néonatale et de décès néotanal. Précisions. 

L’infection à SARS-CoV-2 durant la grossesse est associée à un risque accru de morbidité maternelle et d’évolution péjorative chez le nouveau-né. La vaccination contre la Covid-19 a fait la preuve de son efficacité au sein de populations diverses, y compris chez les femmes enceintes. Malheureusement, en Février 2022, l’US Vaccine Safety Data Link estimait que seules 68 % des femmes enceintes avaient reçu une vaccination complète et qu’il existait une disparité notable, essentiellement liée à l’origine ethnique. Les hésitations suscitées par la vaccination pouvaient être recevables au début de la pandémie, d’autant que les femmes enceintes avaient été exclues des essais cliniques randomisés et que la tolérance en cas de grossesse était présumée mais non prouvée. Toutefois, ces 14 derniers mois, de nombreuses preuves ont été accumulées, témoignant de la bonne tolérance de la vaccination, sans risque supplémentaire de fausses-couches, de naissances avant terme et/ou d’autres pathologies obstétricales ou néo-natales. Dans une livraison récente du JAMA de Mars 2022, 2 articles ont rapporté des données concernant la vaccination de 250 000 grossesses, dans 3 pays différents. Une étude au Canada, une autre en Scandinavie avec des résultats rassurants Fell et ses collaborateurs ont, à partir des registres de naissance de l’Ontario (Canada), identifié 97 590 grossesses éligibles à la vaccination, dont le terme était prévu entre le 14 Décembre 2020 et le 30 Septembre 2021. Dans ce collectif, il y a eu 23 % de femmes vaccinées pendant la grossesse, pour la plupart au cours du 3e trimestre. Comparativement à celles non vaccinées ou l’ayant été après leur accouchement, il n’a été décelé aucun risque supplémentaire d’hémorragie du post-partum, de chorioamniotite, de délivrance par césarienne, d’admission du nouveau-né en réanimation néonatale ou de score bas d’Apgar à la naissance chez les femmes qui avaient été vaccinées durant leur grossesse. La seconde étude a été menée par Magus et coll., à partir des registres de naissance norvégien et suédois. Ces auteurs ont identifié 15 752 grossesses uniques, entre Janvier 2021 et Janvier 2022, de plus de 22 semaines d’aménorrhée (SA). Dans cette cohorte, 18 % des femmes avaient été vaccinées durant leur grossesse, le plus souvent au 2e ou 3e trimestre. Là encore, en comparaison avec des femmes enceintes non vaccinées, il n’a été détecté aucun risque supplémentaire de naissance avant terme, de mort à la naissance, de petit âge gestationnel, de score d’Apgar bas ou d’admission en unité de réanimation néo natale. Élimination des biais Globalement, les résultats rapportés dans ces deux publications sont très rassurants. Ils rejoignent ceux des études antérieures ayant porté sur 40 000 naissances vivantes aux USA et 25 000 en Israël. Tous ces travaux ont de nombreux points forts. Les populations en cause ont été bien ciblées. Les données ont été obtenues à partir de registres nationaux ou régionaux bien validés. Il y a eu des efforts afin d’éviter les biais les plus fréquents. Ces derniers sont essentiellement un biais de vaccination préférentielle de sujets sains, celui lié à des différences dans les indications, celui lié au temps immortel ou en rapport avec le démembrement de la cohorte d’étude. Le premier, dit de vaccination préférentielle, témoigne de différences en matière de santé et de comportements entre sujets vaccinés ou non vaccinés. Il a plutôt un effet protecteur. Le second, différences dans les indications, tend à favoriser la vaccination des populations risque, avec comorbidité et joue en sens opposé. De fait, dans les 2 cohortes de Fell et Magus, citées supra, les femmes vaccinées avaient un meilleur niveau d’éducation (Magus), vivaient dans des zones à plus hauts revenus et fumaient moins (Fell). Afin de contrecarrer ce biais potentiel, Magus a ajusté ses analyses en fonction de l’âge, de la parité, de divers facteurs cliniques et démographiques. Dans l’étude canadienne de Fell, il a été adopté une approche plus sophistiquée, avec calcul de probabilité inverse pondérée de la tendance à la vaccination, afin de minimiser le biais. Le biais temps immortel, pour sa part, est lié au fait que les vaccins ne sont appliqués que durant une période gestationnelle de durée limitée. Pour cette raison, Magus a évalué la vaccination comme un élément temps dépendant, en tenant compte des naissances prématurées et des mort-nés tandis que Fell a analysé plus particulièrement le devenir en péri partum, en considérant que des événements pathologiques tels qu’une chorioamniotite, un Apgar bas ou une admission en soins intensifs néo natals n’étaient pas affectés par la durée de la grossesse. Les travaux des 2 auteurs ont aussi pour but de minimiser le biais de troncature, lié à une sélection trop excessive des grossesses et à un intervalle trop court ou trop long pour l‘ inclusion dans leur essai. Ils ont, pour cela, tous deux exclus les grossesses n’ayant pas atteints 42 SA à la fin de la période de suivi. Malgré toutes ces précautions, il persiste quelques réserves. Aucune vaccination n’a été effectuée durant le 1er trimestre de gestation. Il y a eu peu de précisions concernant la période du péri partum, ainsi que la morbidité du nouveau-né, sa croissance et son développement. Un nombre très réduit de femmes a reçu un vaccin avec vecteur viral. Enfin, des contraintes financières ont pu peser sur l’administration des vaccins à ARNm dans certains pays. Dans l’ensemble toutefois, les résultats rapportés ici, provenant de vastes populations, sont très rassurants à propos des femmes enceintes vaccinées avec un vaccin ARNm durant les 2e ou 3e trimestre de grossesse. Malgré tout, avant de convaincre totalement les femmes de se faire vacciner contre la Covid-19 pendant leur grossesse, les études sur la tolérance vaccinale devront être multipliées dans des pays où d’autres vaccins sont principalement utilisés. Surtout, des stratégies devront être mises en place pour bien informer de l’efficacité et de la tolérance de la vaccination anti Covid durant une grossesse.

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