Publié le 27 sep 2018Lecture 3 min
Addiction, résistance au changement et entretien motivationnel : défis pour les professionnels de la santé
Isabelle MERCKAERT, Bruxelles
Le « craving » - le désir intense de consommer un produit - peut faire suite au manque de ce produit par une abstinence imposée volontaire ou pas. Il peut être aussi déclenché par des indices ou des signaux de sa présence ou par un contexte habituellement associé à sa consommation.
Il y a bien sûr des « craving » de différentes intensités. Le « craving » peut se manifester à des niveaux divers (émotionnel, cognitif, et comportemental). Il y a des « craving » conscients et inconscients. Ces « craving » peuvent être orientés sur l’obtention d’un plaisir associé à la consommation (effets positifs d’un produit) ou sur une réduction d’un déplaisir (effets positifs d’une réduction d’une tension). Le « craving » peut être ainsi pensé, peut être l’objet de ruminations et peut devenir une obsession. Le « craving » s’associe à une forte motivation pour obtenir ce produit et à une impulsion à le consommer. Le sentiment d’un manque, d’un désir et d’une impulsion irrésistible est alors fréquent. L’intentionnalité est limitée et le sujet ne se sent pas en mesure de décider. Le sujet a le sentiment que son action résulte d’un processus automatique. Le niveau d’impulsivité varie d'une personne à l'autre. Pour chaque sujet il faut considérer d'une part le niveau d'impulsivité et d'autre part le niveau de contrôle de cette impulsivité.
C’est l’existence d’intérêts à long terme qui pousse un sujet à postposer l’obtention d’une satisfaction qui peut être retirée de la réalisation d’une action. Une faible tolérance à la frustration, une incapacité de retarder une gratification peut pousser un sujet à ne pas postposer l’obtention de cette satisfaction. Les conséquences à long terme sont alors souvent peu considérées. Les renforcements immédiats sont souvent privilégiés au détriment des renforcements différés dans le temps. L’attention se focalise sur « l’ici et le maintenant ». L’attention est capturée par le présent et se détourne de considérations futures. En d’autres mots, il y a une amplification de l’importance donnée au présent et une réduction de l’importance donnée au futur. L’action — et non la planification — est « choisie ».
L’ensemble de ce processus est très souvent inconscient et donc peu volontaire. La gratification d’un besoin est associée à un bénéfice psychologique. La gratification d’un besoin est associée aussi à un plaisir. Un besoin comblé évite un sentiment de frustration. La recherche d’une gratification d’un besoin est aussi associée à un bénéfice psychologique. La succession ou la répétition d’actions destinées à répondre à un besoin est aussi associée à une certaine satisfaction.
Cette séquence est utile à rappeler pour considérer les forces qui rendent difficile un changement de comportement. Les bénéfices psychologiques associés à un non changement sont en effet bien plus importants que les bénéfices qui peuvent être tirés d’un changement. Un changement de comportement est en général associé à une détresse prolongée. Le maintien de comportements habituels est alors préférable pour éviter cette détresse qui serait expérimentée en cas de changement de comportement. Il y a donc une résistance au changement.
Cependant, s’il y a une détresse qui peut être liée à un changement comportemental, le fait de parler d’un potentiel changement génère peu de détresse et constitue la première étape obligée d’un changement durable. Mener un entretien motivationnel s’inscrit dans ce contexte complexe et doit s’apprendre.
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